Pour alimenter les usines en chaleur, la jeune start-up Jimmy espère pouvoir déployer ses mini réacteurs nucléaires à l’horizon 2026. Reste à avoir l’accord de l’autorité de sûreté nucléaire.

Industrialisation au Creusot, aval de l’Autorité de sûreté nucléaire… Si la route paraît encore longue pour la startup française, Jimmy compte bien déployer ses petits réacteurs pour alimenter en chaleur les usines à l’horizon 2026. Zoom sur cette technologie présentée comme très sûre par les fondateurs.

Production de chaleur

Alors que le cabinet Carbone 4 regrettait dans un bilan de 2022 le peu de place accordée à la production de chaleur dans la transition climatique, la start-up Jimmy compte bien apporter une solution à ce problème.

Les chiffres sont éloquents. Dans l’Hexagone, la production de chaleur est à la première place de l’usage énergétique : 45% de l’énergie consommée au total incombe de ce phénomène - dont 50% pour le résidentiel, 30% pour l’industrie et 20% pour les services tertiaires. Pourtant, 60% de cette énergie est produite de manière carbonée, notamment à partir de gaz naturel.

Antoine Guyot, fondateur de Jimmy, s’empare de cet enjeu et explique dans les Échos : « La production d'électricité étant déjà peu carbonée en France, il fallait s'attaquer en priorité à trois secteurs : le transport, le résidentiel et l'industrie. » Il retient alors la question de la production de chaleur dans les usines.

Rejoint par Mathilde Grivet, diplomée d’HEC, le jeune polytechnicien n’a qu’un objectif en tête : concevoir rapidement une petite chaudière nucléaire opérationnelle.

Des mini réacteurs

Les ingénieurs de Jimmy optent alors pour la technologie HTR, ou high temperature reactor. Moins puissante qu’un réacteur utilisé dans une centrale nucléaire, cette technologie permet de doubler la production de chaleur, tout en offrant une sécurité maximale.

Bien que la faible densité énergétique des HTR ait freiné leur déploiement mondial, plusieurs unités sont en service au Japon et en Chine, prouvant ainsi la maturité de cette technologie. Les équipes de Jimmy ont réussi à l'adapter pour créer une structure bien plus compacte qu'une centrale nucléaire traditionnelle, avec des dimensions de vingt mètres de longueur, largeur et hauteur. Les générateurs de la start-up, d'une puissance de 20 mégawatts thermiques (MWth), peuvent fournir aux industriels de la vapeur atteignant jusqu'à 450 °C.

La production de chaleur provient de la fission de noyaux d'uranium enrichi à 20 %, enfermés dans un combustible spécial appelé « triso » (tri-structural isotropique), le tout étant compacté dans une poudre de graphite qui permet de contrôler la réaction en chaîne. La chaleur est ensuite transportée par de l'hélium dans un circuit primaire, où un échangeur thermique la communique à un circuit secondaire.

La technologie s’avère enfin extrêmement sûre. Antoine Guyot explique par exemple : «En cas d'incident, 99,9 % de la matière radioactive reste prisonnière du combustible et il n'y a donc pas de rejet.»

Horizon 2026

Si l’Autorité de sûreté nucléaire approuve le projet de la start-up, Jimmy devrait pouvoir déployer ses premiers dispositifs en 2026. Antoine Guyot souligne ainsi : “Ce délai rapide s'explique par le fait que la technologie est déjà mature et que la production de chaleur est bien moins complexe que celle de l'électricité. Cela simplifie grandement la structure du réacteur.” Le sucrier Cristal Union a déjà signalé son intérêt pour la technologie et a commandé une unité pour l’un de ses centres de production.

Les mini réacteurs Jimmy présentent en effet plusieurs avantages pour les industriels. Le co-fondateur explique : « Nous sommes actuellement un peu plus chers au mégawattheure que le gaz, dont les prix sont volatils et la gestion coûteuse, et environ équivalent à la biomasse, souligne le cofondateur. En revanche, nos clients ont de la prévisibilité sur vingt ans et font l'économie de crédits carbone. Enfin, la simplicité de notre produit évite des coûts de gestion de l'outil industriel. Au total, nous sommes donc plus compétitifs. »

Si la question des déchets est encore en suspens, Jimmy affirme que chaque chaudière produit seulement une tonne de déchets radioactifs sur un cycle de fonctionnement de vingt ans, dont 20 % sont hautement radioactifs. Elle souligne que 200 générateurs n'augmenteraient que de 1 % la quantité de déchets radioactifs en France. Cependant, l'acceptabilité de ces infrastructures reste incertaine, et il faudra convaincre les riverains de l'innocuité absolue de ces mini-réacteurs nucléaires.

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