Cinq réacteurs nucléaires ont été suspendus le week-end dernier. EDF a pris cette décision en raison de la baisse brutale de la demande en électricité, qui a provoqué une chute des prix. Une situation qui fait grincer les dents des experts de l’énergie : la France valorise-t-elle correctement le surplus de production bas-carbone ?
Chute libre du prix de l’électricité sur le marché de gros. La France a été contrainte de suspendre cinq réacteurs nucléaires le week-end dernier. En cause, la baisse impressionnante de la demande d’électricité.
Ce phénomène signale que la France est désormais capable de produire de l'électricité massivement, notamment grâce au déploiement de dispositifs photovoltaïques, et une rénovation du parc nucléaire. La chute des prix et la perte financière associée soulignent pourtant l’inadaptation du réseau.
L’inadaptation des réseaux
Enfin une bonne nouvelle pour la France ? Après une période de crise qui avait forcé le pays à importer, la consolidation du réseau de production d’énergie devrait faire sourire. Pourtant, les énergéticiens font la grimace. Les prix négatifs provoqués par la fermeture des réacteurs nucléaires, le week-end dernier, soulignent l’inadaptation du réseau de distribution.
En effet, l’importante augmentation de la part des énergies renouvelables dans la production française, conjuguée à une chute de la demande, a déséquilibré le système offre-demande, expliquant la baisse des prix.
Le week-end dernier, ce sont les températures particulièrement élevées qui ont provoqué le déclin de la consommation, portée à des niveaux comparables à un jour de juillet. Dans cette dynamique, les parcs solaires ont fonctionné à haute capacité, atteignant même un pic de 10,7 GW à 13h15 dimanche dernier. Le tarif de l’électricité sur le marché spot a été immédiatement impacté : les prix ont chuté à -39,89€/MWh. Un signe de l’inadéquation des réseaux en cas de surplus de production
Cinq réacteurs fermés
Pour stabiliser l’équilibre précaire entre l’offre et la demande, EDF a pris la décision de suspendre l’activité de cinq réacteurs nucléaires. Les sites de Dampierre 4, Golfech 2, Paluel 4, Tricastin, 1 et 3 ont été déconnectés du réseau samedi matin, et remis en marche le dimanche soir. Tricastin n’a été remis en route que mardi soir.
Or, les capacités de production de ces dispositifs étaient particulièrement importantes. Respectivement 890 MW, 1310 MW, 1310 MW, 1330 MW et 915 MW pour chacun des deux sites de Triscatin.
Un total de 5,4 GW a été affecté par cette suspension de l’activité nucléaire. Or, les spécialistes de l’énergie s’interrogent au sujet de ces coupures, qui risquent de devenir de plus en plus fréquentes avec l’accélération du déploiement des énergies renouvelables, annoncée récemment par le gouvernement.
Les énergéticiens mettent en exergue l’inadaptation du réseau, mal préparé à accueillir ces dispositifs de production, qui dépendent des conditions climatiques sans être directement liés à la demande d’électricité des consommateurs.
Suspendre des réacteurs nucléaires suppose d’engager des montants conséquents, et la perte de production apparaît comme un gaspillage aux yeux des spécialistes, qui plébiscitent la mise en place de solutions.
Comment valoriser la surproduction électrique ?
Dans un contexte d’accélération de la décarbonation à l’échelle européenne, les énergéticiens regrettent de voir ce surplus de ressource électrique bas-carbone gâché.
L’une des solutions proposées résiderait dans le développement des véhicules électriques, qui permettrait de gérer cette surproduction. La recharge est, en effet, une façon de stocker l’énergie produite. Néanmoins, beaucoup d’utilisateurs sont freinés dans l’adoption de ce type de voiture en raison du prix d’achat, particulièrement élevé, et du problème de l’accès à la recharge.
L’accélération de l’électrification de l’industrie, qui supposerait sa décarbonation, valoriserait également la production excédentaire. Les STEP et les méga batteries sont des dispositifs qui présentent une importante capacité de stockage, et qui pourraient profiter d’une électricité moins chère, préservée en cas de demande en baisse.
Une meilleure gestion du réseau électrique semble, dans tous les cas, essentielle.
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