Contrairement aux idées reçues, la France se distingue grâce à son fort pouvoir d’attraction sur le secteur industriel. Avec son électricité décarbonée et les soutiens publics, elle se démarque du reste de l’Europe.

Coup de poker ? La France, dotée d’un réseau électrique largement décarboné grâce à ses centrales nucléaires historiques et à l’essor des énergies renouvelables, déjoue les idées reçues en affichant une forte attractivité pour le secteur industriel. Soutenue par des politiques publiques ambitieuses, elle est en passe de se positionner comme un acteur clé sur la scène industrielle européenne.

Une énergie décarbonée

D’après le Bilan électrique 2023 de RTE, les émissions de gaz à effet de serre du système électrique français ont atteint un niveau historiquement bas en 2023, avec seulement 16,1 millions de tonnes d’équivalent CO2, un record depuis les années 1950. L’intensité des émissions de la production française, mesurée à 32 g de CO2eq par kWh, est dix fois inférieure à celle de l’Allemagne et plus de huit fois inférieure à celle de l’Italie, plaçant ainsi la France parmi les pays les plus vertueux d’Europe, aux côtés de la Suède et de la Norvège, reconnus pour leur production hydraulique abondante.

Cette électricité bas carbone est un levier clé pour attirer les investissements étrangers, comme l’a démontré le sommet CHOOSE FRANCE à Versailles le 13 mai dernier. Lors de cette rencontre, 56 nouveaux projets, totalisant 15 milliards d’euros, ont été annoncés. Parmi eux, Microsoft a révélé un investissement de 4 milliards d’euros dans la création de data centers pour développer l’intelligence artificielle et le cloud. « Microsoft choisit la France […] parce qu’on a l’électricité décarbonée et pas chère », a expliqué Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie et à l’Énergie, sur France Info, en soulignant que cet avantage comparatif est souvent décisif pour des infrastructures énergivores comme les data centers.

D’autres aspects renforcent également l’attractivité du pays. “La fiscalité ça joue, le foncier, les terrains, l’électricité décarbonée, la capacité à générer du talent, on a aujourd’hui des ingénieurs, des techniciens qui sont connus pour la qualité de leur travail, c’est vraiment l’ensemble de l’œuvre”, a résumé Roland Lescure.

Haut lieu des investissements

Ces récentes annonces confirment la montée en puissance de la France comme destination privilégiée pour les investissements. Selon le Baromètre EY de l’attractivité 2024, la France a maintenu sa position de leader européen pour les investissements directs étrangers en 2023, et ce pour la cinquième année consécutive. Elle devance ainsi le Royaume-Uni et l’Allemagne, tant en termes de création que d’extension de sites. En particulier, avec 530 créations ou extensions d’usines, soit une baisse de 3 % par rapport à l’année précédente, la France se positionne également comme la première destination européenne pour les investissements industriels. EY souligne que cette dynamique, portée par des projets de méga-usines dans des secteurs stratégiques comme celui des batteries, reflète un renouveau de la production en France.

Le rapport met également en lumière l’attractivité croissante des secteurs liés aux nouvelles technologies – en particulier l’intelligence artificielle –, à l’énergie et aux mobilités, illustrant les effets positifs des politiques de réindustrialisation menées dans le pays. Le plan d’investissement France 2030 semble d’ailleurs porter ses fruits. D’après le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI), à la fin de 2023, 29,9 milliards d’euros sur les 54 milliards de crédits prévus avaient déjà été engagés. Le Comité de surveillance des investissements d’avenir (CSIA), dans son rapport de juin 2023, confirme que ce plan soutient le développement de la chaîne de valeur du véhicule électrique, favorise l’implantation d’usines de fabrication d’électrolyseurs pour l’hydrogène, ainsi que de semi-conducteurs. Il note aussi l’émergence de nouveaux acteurs innovants dans les domaines du quantique, de l’espace et de la santé.

Combattre le géant chinois

Pour rester compétitive face à la concurrence chinoise, la France incite l’Union européenne à renforcer la protection de son industrie. En particulier, elle ambitionne de développer son secteur des véhicules électriques en misant sur l’implantation de gigafactories pour la production de batteries et la création d’usines de recyclage.

Afin de défendre l’industrie européenne contre ce que la France qualifie de concurrence « déloyale » venant de Chine, la Commission européenne a introduit des droits de douane provisoires sur les véhicules électriques à batterie importés de Chine. Ces droits varient de 17,4 % à 37,6 %, selon le niveau des subventions publiques reçues par les entreprises chinoises, et s’ajoutent aux 10 % de taxes déjà en vigueur dans l’Union européenne.

Par ailleurs, alors que le marché européen est inondé depuis plusieurs mois de panneaux solaires chinois à bas coût, les acteurs du secteur appellent à l’ouverture d’une enquête sur les subventions accordées par la Chine à ses fabricants. Le fonctionnement du système électrique français devrait par ailleurs favoriser cette dynamique. L’Union européenne et la France seraient-elles en train de réussir leur pari de relocaliser les industries stratégiques de demain ?

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