Le streaming, nouveau poids lourd de l’industrie musicale
En 1982, Jack Lang instaurait la toute première Fête de la musique, un événement qui sera ensuite repris dans de nombreux pays, et qui continue d’être célébré aujourd’hui. Tous les 21 juin, les musiciens amateurs peuvent se produire dans les espaces publiques. Elle permet aux français, mais aussi à de nombreux européens, de découvrir des musiques de toutes sortes et de profiter d’un moment convivial !
La Fête de la musique est une célébration particulièrement appréciée. Et pour cause : depuis quelques années, l’industrie musicale bat son plein. Selon une étude Midia Research, elle a généré près de 17.4 milliards de dollars sur l’année 2017, soit une progression de plus de 8.5% par rapport à 2016. Ecouter de la musique, c’est quelque chose que tout le monde fait, depuis très très longtemps… Essayez de trouver une activité que vous faites régulièrement, et que faisait aussi votre arrière grand-père ? Bingo.
Pourtant, la crise du disque dans les années 2000 avec l’arrivée d’internet et de plateformes de téléchargements illégaux comme eMule annonçait la mort du “Compact Disc”, entraînant avec elle les artistes, qui voyaient alors une grande partie de leurs revenus partir en fumée sous forme de fichiers torrent. La vente de CD est toujours en chute libre, et ce depuis presque 20 ans. Seulement aujourd’hui, une grande partie des revenus de l’industrie musicale est générée par les plateformes de streaming. Elles sont désormais nombreuses à proposer des abonnements aux utilisateurs, pour qu’ils puissent écouter n’importe quel artiste, à n’importe quel moment de la journée, et ce, en illimité.
Spotify, Deezer, Apple Music et bientôt la plateforme Youtube Music – pour les plus connues – révolutionnent la manière dont nous consommons la musique, si bien que les disques se vendent de moins en moins, sans pour autant influer sur les revenus des artistes.
Le streaming aujourd’hui, c’est 43% des revenus globaux générés par l’industrie de la musique en 2018, soit 7.3 milliards de dollars. C’est avéré, le streaming est bien parti pour remplacer durablement les CD : les revenus générés par le streaming augmentent de 39% chaque année, et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Sans oublier que la musique, c’est aussi l’occasion de se retrouver et de partager un bon moment autour d’un concert dans un bar, d’un show à Bercy, lors d’un festival de musique… Des manifestations qui génèrent toutes de l’argent. Bref, l’industrie musicale a de beaux jours devant elle.
Du CD au streaming : moins de plastique, plus de CO2
Certes, les amoureux du disque seront déçus de voir cet objet peu à peu disparaître au profit de plateformes de streaming regroupant tous les artistes entre eux, faisant de la musique un bien de consommation comme un autre, quand avant, aller s’acheter un disque ou même un vinyle était un rituel et une pratique faisant partie intégrante de l’expérience même de l’écoute. Les écolos eux, s’en sont réjouis dans un premier temps : la fabrication des disques est très polluante et ils sont très peu recyclés, alors que leur production a un véritable coût environnemental. La plupart du temps, ils finissent rayés, rangés dans la mauvaise pochette, perdus dans un carton, en bref, inutilisés. Et avouons-le, un disque, ce n’est pas le genre d’objet qu’on irait naturellement placer dans une poubelle.
L’âge d’or du disque est terminé, et avec lui, l’utilisation du plastique liée à l’industrie musicale a énormément chuté : en 2000, 61 millions de kilogrammes de plastiques étaient utilisés pour fabriquer les CD, contre 8 millions de kilogrammes en 2016. Mais ne pensez pas pour autant qu’écouter votre musique en streaming est plus écologique : il n’en est rien. Ecouter en boucle nos morceaux préférés a un sérieux coût pour l’environnement, et le passage au streaming est beaucoup plus polluant qu’on ne le croit !
Comment ça, le streaming, ça pollue ? On ne va pas vous faire un dessin, mais pour vous donner une idée : les 5 milliards de vues qu’a comptabilisé la (trop) populaire chanson Despacito, a consommé autant d’électricité l’an dernier que la consommation électrique de cinq pays d’Afrique réunis !
Un récente étude publiée l’an dernier par des chercheurs de l’université de Glasgow nous informe d’ailleurs que les émissions de gaz à effet de serre générées par l’industrie musicale ont doublé de volume entre 1977 et 2016.
Le saviez-vous ?
Aux Etats-Unis, l’industrie musicale a émis plus de 250 millions de kilogrammes de gaz à effet de serre en 2016.
Certes, nous consommons beaucoup moins de CD, et de surcroît, de plastique au fur et à mesure que les gens se détournent de l’achat des albums. Mais surprise ! Consommer de la musique en ligne est visiblement encore plus polluant pour la planète.
Les plateformes de streaming nous proposent d’avoir accès à une immense bibliothèque de morceaux et d’artistes en ligne. Pour nous permettre de profiter pleinement de nos musiques préférées, les morceaux doivent alors être stockés sur des serveurs qui consomment énormément d’énergie ! Pour aller encore plus loin, pensez également à l’empreinte environnementale des objets qui vous permettent d’écouter de la musique au quotidien : la production de smartphones et d’ordinateurs est extrêmement polluante, et les matériaux les composant sont difficilement recyclables.
Pollution et industrie musicale : comment limiter son empreinte écologique ?
Alors, que faire pour limiter son empreinte écologique et consommer de manière plus raisonnée ? A ce jour, aucune alternative vraiment viable n’est proposée pour remplacer le streaming et pallier à la pollution induite par notre consommation de musique, si ce n’est de moins se servir des plateformes, ce qui reviendrait à limiter ses heures d’écoute.
Un des problèmes de la pollution liée au streaming aujourd’hui semble être le même que celui de nombreux biens de consommation dont la production pollue plus que ce que notre planète peut encaisser : nos habitudes de consommation sont excessives. Les plateformes comptent de plus en plus d’utilisateurs, et leurs catalogues sont de plus en plus fournis. Essayez d’imaginer un monde où le nombre d’heures d’écoute par personne sur les plateformes de streaming serait le même que celui que nous avions lorsque l’industrie du disque battait son plein : la transition vers le streaming aurait très certainement eu un impact plus positif pour l’environnement.
Le problème de la pollution liée au streaming en France, et même dans le reste du monde, n’est pas beaucoup mise en avant. Certes, les déchets plastiques s’en voient limités, et de toutes les industries, l’industrie musicale n’est certainement pas la plus polluante… Et elle n’est pas vraiment dans le viseur de ceux qui se battent pour la cause environnementale, ce qui est tout à fait justifié.
Pourtant, quelques initiatives écologiques prometteuses voient parfois le jour dans le milieu de l’industrie musicale ! La start-up Feedbands en fait partie : elle met à disposition des utilisateurs une plateforme de streaming écologique. A chaque fois que vous écoutez 100 morceaux sur la plateforme, Feedbands plantera un arbre pour vous ! D’après les comptes sociaux de la start-up, cela correspondrait à plus de 5 000 arbres plantés depuis le lancement de la .
A défaut de pouvoir limiter la pollution liée à l’industrie musicale, une étude britannique avance aussi l’idée qu’il est possible de produire de l’énergie grâce à certaines vibrations acoustiques ! En faisant des panneaux solaires acoustiques, il serait possible d’améliorer de plus de 50% le rendement des cellules photovoltaïques produites par les centrales.
Les festivals et autres manifestations musicales ont également un coût pour la planète : les installations, les stands de nourriture et de boissons mis à la disposition des festivaliers, et les équipements sanitaires polluent énormément ! On considère d’ailleurs qu’une manifestation regroupant 1000 personnes représenterait par jour l’équivalent de 500 kilogrammes de déchets, et la consommation de 30 000 litres d’eau. Multiplié par le nombre réel de festivaliers qui se regroupent chaque année pour un événement comme Coachella, cet impact environnemental est énorme.
Si de nombreuses initiatives sont aussi mises en place dans ces festivals pour les rendre éco-responsables, et limiter l’impact environnemental de leur organisation comme des gobelets recyclables, des toilettes sèches ou encore des éclairages LED, il n’en reste pas moins que les groupes électrogènes utilisés pour diffuser la musique dans les festivals sont très énergivores. Un collectif Allemand a proposé une alternative à ces enceintes très polluantes : remplacer l’essence utilisée pour faire fonctionner les équipements par des panneaux photovoltaïques ! Cela permettrait de rendre les équipements autosuffisants, et d’alimenter les festivals en énergie verte pour limiter leurs émissions de gaz à effet de serre.
En attendant, si vous voulez réduire votre impact environnemental et écouter de la musique en polluant moins, vous pouvez toujours délaisser Deezer, Spotify ou autre plateforme de streaming musical et descendre dans la rue les vendredis 21 juin, pour profiter de représentations en plein air ou faire de la musique !
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